Clac Clac Clac. Le léger bruit des talons d'une femme résonnait dans toute la réception du château. Grosse lunette de soleil de marque sur le nez, cheveux coiffé en une natte élégante; Naïri marchait tranquillement, suivit de près par le chauffeur du taxi qui trainait ses valises, ne se souciant pas des regards qui se tournais vers elle à son passage. Oui c'était bien le chauffeur qui se coltinait ses valises... Ce n'était pas vraiment son job mais quand il avait vu la somme que lui proposait la belle brune pour le faire, il n'avait pas pu refuser, se disant que le poids qu'elles devaient faire n'était rien du tout. Soudain Naïri s'arrêta devant le comptoir et le pauvre bonhomme manqua de lui tomber dessus en étant entraîné par le poids du sac sur ses épaules. La jeune femme se retourna et de derrière ses lunettes, le regarda méchamment. "Vous pourriez faire attention !" Oui, Naïri est une sale garce, se n'est pas nouveau. Retrouvant son calme, elle se tourna vers la réceptionniste et lui fit un grand sourire. "Bonjour, j'aimerais une chambre s'il vous plait" "Qu'elle est votre nom ? "Naïr... Elle s’interrompit un instant puis reprit. Arévalouys Naïri Yan" "Bien. Un instant s'il vous plait." Elle s'accouda au comptoir, le pied tapant le sol avec impatience. Puis elle jeta un coup d’œil à la secrétaire et voyant qu'elle pianotait toujours à son ordinateur, elle décida d'aller s’assoir sur un des sièges. Elle croisa les jambes et se mit à admirer sa manucure. "Excuser moi mademoiselle, mais est-ce que je peux partir ?"
Pendant un instant elle eut envie de lui dire non, mais elle changea d'avis en se disant qu'elle trouverait bien un autre pigeon pour l'aider. "Bien sur. Laissez les valises là." "Merci." Avec soulagement, le jeune homme laissa tomber à terre l'énorme sac qu'il avait sur le dos mais pris plus de précaution avec les autres lorsqu'il vit le regard froid de Naïri par dessus ses lunettes. Une fois le chauffeur partit, elle se remit à regarder ses ongles et en voyant la bague encore présente à son annulaire droit, elle sourit. En effet, la belle avait été mariée mais pour des raisons assez malsaine. Un jour lors d'un gala elle était tombée sur un papi millionnaire et elle avait eu la subite envie d'essayer de faire comme dans les films; le séduire, passer en première héritière de sa fortune et attendre patiemment qu'il décède. Et bien sur ça avait marché. Elle détenait maintenant une fortune presque inestimable et se foutait royalement des remarques que lui faisait le fils de son ex-maris, disant qu'elle était une croqueuse de diamant. Ce qu'en réalité, elle était.

Dehors, les rayons du chaud soleil perçaient à travers les nuages, le château était plongé dans une atmosphère douce qui vient après une tempête. Jay était assis sur un des canapés rouges qui permettaient aux invités de patienter avant de pouvoir échanger quelques mots avec les magnifiques -ou très moches- hôtesses de l'accueil. Le jeune homme avait le regard dans le vague, il observait les nuages d'un gris bleu presque éblouissant, on aurait dit un gros rêveur qui n'a jamais les pieds sur terre, ou alors un oiseau qui n'a plus d'aile et qui rêve de repartir visiter les cieux. Ses yeux braises étaient éclairés par une lueur qui semblait venue tout droit du ciel, juste pour pouvoir les faire s'embraser... Jay s'était accroché quelques heures avant avec un autre homme et il ressassait sa colère, de plus, juste un peu avant l'altercation, il avait reçut un message de sa mère. Lui qui pensait ne plus jamais entendre parler d'elle et qui avait fait une croix sur son nom, il se sentait juste perdu. Un peu comme une loque, un objet sans vie qui attend patiemment d'être dépoussiéré sur une étagère, cette sensation de vide que vous ressentez après avoir pleuré pendant des heures, après avoir perdu quelque chose ou quelqu'un qui vous est cher. Le jeune homme détourna soudainement le regard comme si il venait de se réveiller et scruta la salle à la manière d'un aventurier qui fixe l'horizon, il n'y trouva rien d'intéressant. Soudain ses yeux se posèrent sur une jeune fille qui faisait souffrir un homme avec une imposante valise, cela eut pour effet de faire sourire Jay qui continua à observer la scène. Le visage de la femme ne lui paraissait pas étranger et cela l'intriguait. Une fois l'homme partit, le garçon se leva sans précipitation et vint s'assoir derrière la fille, qui ne l'avait pas encore remarqué. Il figea sur ses lèvre un sourire très séduisant puis ajouta hilare: « Vous les traitez tous comme ça ? »

Tout était calme, tranquille, enfin presque... Absorbée dans ses souvenirs, Naïri n'avait pas remarqué qu'un jeune c'était assis derrière elle. Elle sursauta quand celui-ci l'interpella. Alors, elle se retourna lentement tout en enlevant ses lunettes, prête à foudroyer du regard celui qui avait osé la surprendre. Mais en tombant sur ce visage si particulier et ce sourire charmeur, la jeune femme se retint et lui fit son plus beau sourire. "Sa dépend de leur tête." Répondit-elle tout simplement, comme si traiter les gens ainsi était normal. Puis elle s'aperçut que ce visage ne lui était pas inconnu. Un homme maquillé sa ne courait pas les rues, et pourtant, elle n'arrivait pas à se souvenir où est-ce qu'elle l'avait déjà vu.
En ayant marre de devoir se contorsionner pour voir le jeune homme, elle se leva et commença à déplacer son fauteuil pour qu'ils soient face à face, malgré les talons hauts sur lesquelles elle était perchées. Comme toute les idées qu'elle entreprenait, elle réussi et même sans se casser un seul ongle ! Elle avait presque envie de se féliciter; un petit sourire en coin se dessina sur son visage à cette pensée. Elle voyait bien la secrétaire sautant partout et frappant des mains tout en s'extasiant sur cet "exploit". Préférant s’assoir au lieu de rigoler toute seule à ses conneries, elle se mit à fixer cet inconnu dans les yeux d'un regard charmeur et tendis lui tendis sa main droite. "Je m'appelle Naïri et toi ?".

Plus Jay regardait la jeune fille, plus il avait l'impression de l'avoir déjà vu. Non, c'était sur, il avait déjà croisé ce regard charmeur quelque part et ces longues jambes perchées sur des talons aiguilles; mais où ? Allemagne ? États Unis ? Ou alors ici ? Non, il s'en souviendrait... Après tout cela ne faisait que quelques semaines qu'il s'était installé ici; à vrai dire, exactement un mois, jours pour jours. Le vingt huit septembre il était ici, à peine arrivé, il avait filé dans sa chambre sans prendre le temps de saluer personne à part la femme de l'accueil qui lui avait donné ses clés. Le jeune homme rigola à la remarque de la femme, elle semblait superficielle et le fait qu'elle s'attache aux apparences ne l'étonnait pas le moins du monde. Il lui sourit tout en lui rendant son regard charmeur, après tout, il avait aussi le droit de rentrer dans son jeu de séduction et de s'amuser un peu non ? Il n'était pas venu ici pour faire abstinence non plus... Lui tendant à son tour la main il ajouta: « Moi c'est Jay ! » A vrai dire le fait qu'ils étaient souls quand ils se sont rencontrés devait y être pour quelque chose dans le soudain trou de mémoire du jeune homme; mais bon, ça allait lui revenir...

Jay... En plus de son visage, son prénom lui disait vaguement quelque chose. Il c'était déjà rencontré, aux États-Unis pour être plus précis, mais elle n'avait pas vraiment été dans son état normal quand ils s'étaient rencontrés... elle avait été bien saoul et c'était en parti à cause de ça qu'elle ne se souvenait pas d'où elle l'avait vu. Mais elle finirait bien par s'en souvenir !
Se rappelant qu'elle attendait toujours qu'on lui donne une chambre, elle tourna la tête vers la secrétaire. "Elle vient quand cette chambre ?!", dans sa voix résonnait encore un peu cet accent du pays d'où elle venait. Elle avait mis t'en de temps à réussir à l'effacer qu'elle ne comprenait toujours pas pourquoi il resurgissait parfois. "Encore un instant s'il vous plait". Elle soupira bruyamment, lui faisant par de son mécontentement. Puis elle accorda à nouveau son attention sur le jeune homme. "Alors, dit moi tout Jay ! Qu'est-ce qui a à faire ici ?" Naïri n'était pas le genre de femme à rester cloué dans un château à se lamenter sur sa vie. Elle, elle voulait sortir faire la fête, dépenser tout son argent et pourquoi pas commettre des petits vols par-ci par-là, mais étant nouvelle, elle ne savait pas trop si elle se trouvait dans un trou pommé, même si elle avait sa petite idée...